jeudi 20 octobre 2016

L'atelier d'écriture n°188 de Leiloona : Une maison en ruines...

Et me revoilà devant cette demeure remplie de souvenirs. Les mêmes feuilles piquées de verts, les volets rouillés par les années d'abandon, les filets de fer qui retiennent les murs orangés qui menacent de s'effondrer. Ce qui me scotche le plus, c'est cet arrêté municipal qui orne la porte d'entrée. Je n'ai pas compris un traître mot de cet arrêté, si ce n'est que la baraque est en ruine, qu'il est formellement interdit de pénétrer dans cet édifice, sous peine d'une amende. En gros, on ne peut rentrer à l'intérieur me murmure ma mère entre deux sanglots. Punaise! Ce sont plus de vingt ans de souvenirs, vingt de vie qui vont disparaître le jour ou la maison s'effondrera. Mes parents n'ont cessé de me répéter que c'est ici que j'ai appris à marcher, que j'ai appris à parler, que j'ai appris à lire. C'est également dans cette demeure que nous passions un mois de vacances tous les étés. Nous allions à la plage, où je pêchais avec ma sœur. Nous nous baladions souvent dans le petit village à travers ses dédales de rues escarpées et colorées comme un damier sur lequel on jouerait aux échecs. Alors, le jour où il a fallu m'expliquer que je ne reverrais plus jamais cette maison, que je ne m'amuserais plus à me cacher derrière le fauteuil de mamie pour lui faire peur, ce fût touteune histoire. Mes parents me prenaient vraiment pour un bébé, mais c'était "pour ne pas trop te brusquer" m'avouèrent-ils après coup. J'ai dû endurer des heures interminables d'explications pour le même résultat. Mamie était morte car son coeur s'était arrêté de battre. "Mais elle est partie pour un long voyage dans le ciel"... Nous avons donc entrepris de venir jusque ici pour vider la maison de Grand-Mère. Je vous laisse deviner la stupéfaction et la stupeur qui se lisaient sur nos visages lorsque nous avons pris connaissance de l’arrêté. Nous nous sommes donc rendus à la mairie pour avoir plus d'informations. Nous y avons appris que la maison était classée "en ruine" et que personne n'était autorisé à y rentrer, même pas la famille proche de la défunte. De retour devant la ruine, nous la regardâmes, impuissants. Puis ma mère commença à pleurer.
- Elle est morte, et je ne peux même pas rentrer... dit-elle dans un souffle,
Il faut que je vous avoue quelque chose. Je ne considère pas que mamie soit morte. Car son souvenir et son être sont bien vivants, mais à l'intérieur de nous. C'est elle qui fait pleurer ma mère. Tant que l'on se souvient d'elle, elle trouvera toujours une place dans notre coeur. Elle jouera avec nos sentiments, ce qui prouve qu'elle vit, mais à l'intérieur de nous. On peut modeler son souvenir comme l'on veut, elle trouvera toujours sa place. Chacun possède une "mamie" différente. Chiante pour mon père, protectrice pour ma mère, drôle pour moi et ma soeur. Mais ne dites cela à personne, sinon on va croire que je suis perturbépsychologiquement à cause de ce décès, ce qui n'est pas le cas. De plus, je dois rester fort pour mes parents et ma soeur. C'est au moment ou je pense cela que mon père hurle:
- On va rentrer! Pour les souvenirs, pour ma belle-mère et pour lui rendre hommage.

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