jeudi 19 mars 2020

Un recueil de nouvelles technologique : Ne quittez pas ! de Marie Sizun

Auteur : Marie Sizun

Maison d'édition : Arléa 

Collection : 1er mille

Nombre de pages : 248 pages

Année de sortie : 2020





Indispensable téléphone, dont l’usage est devenu si naturel que nous oublions de nous étonner de sa magie. Qu’il s’agisse d’amour, de rupture, de la mort d’une mère ou d’une conversation interrompue, combien de moments importants ou anodins sont vécus « au bout du fil » ?
Marie Sizun, dans une quarantaine d’histoires empruntées au quotidien, tout à tour légères ou graves, drôles ou cruelles, en dresse l’inventaire romanesque.








Je tiens tout d'abord à remercier les éditions Arléa pour cet envoi !


 
 Par ces temps emplis d'une technologie bouffante, il me semblait important de s'arrêter quelques instants sur l'impact que le progrès, et plus particulièrement les téléphones, fixes comme portables, peuvent avoir sur nos vies. C'était une promesse du titre, de la couverture, et du format : des nouvelles. Un petit bout de temps que je n'avais pu en découvrir, et bien me voilà servi. Avec hétérogénéité et originalité. 






"Le message invisible, fragile, ignoré, passe au-dessus de la foule."


Marie Sizun a su faire preuve d'une formidable imagination domptée par une plume qui a su transformer la multitude de profils proposés en un ensemble fluide et cohérent. Vous vous doutez qu'il sera impossible d'établir un avis pour chaque histoire que la romancière a su nous proposer. C'est un point qui m'a fait peur au début. Peur du travail bâclé, étant donné la longueur de l'oeuvre (235 pages de lecture environ) par rapport à la durée de certaines nouvelles. Mais en réalité, pas du tout. J'ai été très agréablement surpris par le début de ma lecture, et d'ailleurs tout au long de celle-ci. Marie Sizun arrive, tout en décrivant en réalité assez peu les personnalités des personnages (peut-on vraiment parler de personnage dans ce cas ? Ou plutôt de profil ? A vous de trancher) à les faire adopter au lecteur, soit par un trait caractéristique particulier sur lequel elle appuie, mais aussi sur son passé ou par ses actions et ses émotions sur le moment. Le seul point commun ? Cette formidable invention qu'est le téléphone. Je m'attendais à recevoir dans ce recueil une pluie de critique le concernant, mais pas du tout, bien au contraire. On trouve ici une apologie inédite, un maniement de l'objet complètement différent de ce à quoi je m'attendais, moi qui ait simplement parcouru le résumé pour en saisir le thème général. Et c'est une prise de conscience. Par une annonce, une habitude, une voix, un message, le téléphone a définitivement marqué une génération, et la démonstration est faite ici. Même plus que notre simple génération du 21ème siècle, beaucoup d'adultes, voir de personnages de plus de 60 ans ont pris cet progrès technologique et se le sont approprié. Et ces histoires ont su me toucher au fur et à mesure de ma lecture, face aux différentes situations. Je me suis pris au jeu des découvertes des vies, des personnes, mais aussi des découvertes sur la manière avec laquelle ce petit objet est entré dans nos vies, et comment il a su marquer, positivement ou négativement, chacun d'entre nous. On peut même s'identifier à certaines histoires, de part l'âge ou le récit des protagonistes. Ainsi, ce grand recueil, qui mélange progrès, jeunesse et choc générationnel, a tout ce qu'il faut pour plaire aux désireux d'un mélange moderne et traditionnel, duquel le téléphone est à coup sûr un point d'union. 




"L'infirmière avait dit qu'on l'appellerait si ça devait aller plus mal."


De part le format, je ne peux ici aborder et discuter des personnages de l'oeuvre de Marie Suzin. C'est pourquoi j'aimerai parler d'un point qui me paraît essentiel, sans doute la raison pour laquelle j'ai décidé de recevoir ce roman pour une lecture. Le progrès technologique a amené le téléphone dans toutes nos chaumières, et l'a rendu familier et indispensable pour quasiment tout le monde, peu importe l'âge et la situation. Et cette lecture a été pour moi comme une prise de conscience de ce fait. Si l'on oublie un instant les nouveautés démentielles du portable (applications, réseaux sociaux,...) le simple fait de pouvoir obtenir la voix, la parole de quelqu'un malgré la distance et les obstacles reste une véritable révolution. Si c'est un fait commun aujourd'hui, Marie Sizun permet aussi à son lecteur d'avoir une certaine prise de recul sur cet outil de notre vie. Je m'attendais à une morale comme : "le téléphone est un élément addictif, qui détruit nos vies et nous éloigne là où il aurait du nous rapprocher". Sa mise en valeur contraire m'a tout de même permis de me rendre compte à quel point son utilisation est essentiel dans ma vie. Peut-être est-il venu le moment de nous freiner ? De récupérer le contact humain en retrouvant la patience de l'attente d'avoir l'interlocuteur en face ? Mais cela n'est-il pas un frein à l'Histoire, aux progrès numériques qui touchent chacun d'entre nous un peu plus chaque jour ? Beaucoup de constats, et de réflexions, si l'on prend le temps de poser le recueil quelques minutes et d'y réfléchir vraiment. Peut-être n'était-ce pas du tout le souhait de la romancière avec ce texte, mais il est vrai que 'Ne quittez pas' peut aussi montrer l'emprise du téléphone sur nous, et ainsi faire réfléchir en profondeur chaque lecteur, une autre facette, que j'ai beaucoup apprécié. 



"Quand mon portable se met à sonner, je ne reconnais pas le numéro qui s'affiche."


Pour finir, quelques petites lignes sur la plume de Sizun. Coulante sans être plate, elle a réussi à m'immerger dans l'oeuvre et dans toutes les nouvelles pendant ma lecture. Je me suis souvent imaginé, me baladant dans les rues et les habitations de Paris, m'arrêtant quelques secondes dans chaque foyer, pour juste y saisir la relation présente avec le téléphone, et puis repartir, aussi soudainement. C'est un peu la sensation que j'ai eu en lisant les deux premières nouvelles. J'ai même cru que l'oeuvre allait s'articuler autour des habitants d'un immeuble, avant de comprendre finalement la bifurcation complète de l'auteure, quand celle-ci ancre certaines aventures à l'étranger, en Allemagne ou aux Etats-Unis. Je ne me suis ainsi jamais ennuyé, Sizun arrivant toujours à proposer de nouvelles originalités à ses nouvelles. D'un point de vue scénaristique comme dans la plume, aucun de ces histoires ne se ressemblent réellement. Pour cette raison, je trouve que l'oeuvre n'est ni trop lourde, ni trop légère. La plume a aussi su me marquer sans m'ennuyer. Très bon dosage, en somme.




 
Pour conclure, ce fût une lecture changeante, qui m'a définitivement sorti de ma zone de confort, tout en me faisant entrer dans une autre : celle de la réflexion. 'Ne quittez pas' offre un éventail dense d'histoires condensées, dont on se souvient plus ou moins, mais que l'on finit toujours par apprécier. La mise en avant du téléphone permet aussi de réfléchir plus en détail à son utilité et à sa présence de nos vies. L'écriture de Marie Sizun a enfin su m'immerger, sans pour autant me perdre. Une chaleureuse recommandation !

1 commentaire:

  1. C'est fou de retomber ici, un peu par hasard, un ou deux ans plus tard...
    Je suis ravie de voir que tu as continué la blogo, j'ai parcouru rapidement c'est très chouette ce que tu fais ! Surtout tes écrits...

    J'espère que tu vas bien :)
    Victoria (aliais Victoire3)

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