mercredi 26 décembre 2018

Happa No Ko de Karin Serres

Auteure : Karin Serres

Maison d'édition : Le Rouergue jeunesse

Collection : Epik 

Nombre de pages : 144 pages

Année de sortie : 2018





La planète est désormais couverte par une seule ville, aux tours immenses, d’où toute nature a disparu. Les humains passent leur temps à jouer, tandis que les robots sont au pouvoir. Un matin, Madeleine, une ado vivant dans le quartier France 45-67, découvre que ses mains sont devenu vertes… Mais elle n’est pas la seule : de l’autre côté de la planète, Ken, du quartier Japon 23-58, est aussi victime de ce phénomène. 




Je tiens à remercier grandement les éditions du Rouergue pour cet envoi ! 

Epik' est une collection riche et prometteuse, au Rouergue. On y retrouve des titres fort intrigants et intéressants. Suffit-il de citer Srirus (lien à coller), ce texte fabuleux d'un Stéphane Servant. Pour ce roman de Karin Serres, on retrouve également une dystopie, mais sous une autre forme. Une ville. Infinie. Prometteur ? Vous ne croyez pas si bien dire. Allons-y ! 





"La veille au petit jour, un mardi, quand la sirène du matin l'avait réveillée comme d'habitude, Madeleine avait eu un choc : la dernière phalange de chacune de ses dix doigts était verte." 



Si l'univers et la première de couverture ont su me convaincre de le demander, j'ai eu tôt fait de complètement oublier ce qu'il pouvait s'y produire, dans ce territoire infini. Bien que j'ai eu un peu de mal avec les personnages au tout  début, notamment à cause de leur âge (assez peu mâtures à mon goût), il s'est avéré finalement être un petit détail qui ne dérange absolument pas le déroulé du récit. Celui-ci est très riche, avec beaucoup de détails, de révélations, de rebondissements ou de retournements de situation. De mon propre aveu, j'ai vraiment été surpris de ce que j'ai trouvé dans ce bouquin. Le récit, que j'attendais linéaire, tient véritablement en haleine le lecteur. On se trouve plongé dans cette ville infinie, où la technologie est si poussée mais... Finalement si banalement acceptée que ça en deviendrait presque glauque. S'il est évident que le message délivré concerne l'écologie et le fait de préserver la nature, représentée par ces créature issues de la mythologie nippone, les Happa No Ko,  j'y ajouterais cependant qu'un certain dégoût de la robotisation et de la technologie futuriste qui envahit le monde actuel est palpable, quand on referme tel roman.
Pour revenir à l’intrigue pure, on retrouve donc Madeleine et Ken, deux enfants (je ne connais pas réellement leur âge mais je pense qu'ils ont aux alentours de 12 ans, à tout casser c'est peut-être inscrit dans le bouquin, rien n'est sûr). Un beau jour, l'un comme l'autre se réveillent avec les mains complètement vertes. Si elle ne sait pas du tout ce que cela signifie, lui comprend très vite les enjeux d'une telle particularité. Franchement, c'est une aventure très originale qui est proposée ici. Je n'ai jamais vraiment eu la sensation de déjà-vu, au contraire. Si les descriptions et les noms donnés aux nouvelles technologies (machine-police par exemple) peuvent paraître simplistes, le lecteur se rend vite compte que cela ajoute encore du réalisme au bouquin. Très vite, j'ai été subjugué, et j'ai dévoré le roman en quelques jours à peine. Happa No Ko est une oeuvre importante dans l'époque actuelle, qui arrive à renouveler le genre de la science-fiction axée jeunesse grâce à un l'excellent monde proposé avec une histoire prenante et intelligente. Les personnages, que je voyais d'un oeil dubitatif, ont toutefois réussi à me convaincre, à leur manière. 


"- On a réussi, Ken, quand même, hein ? sourit la jeune fille. 
- Oui, Madeleine, murmura-t-il. Mission accomplie." 


Je me suis souvent interrogé sur l'âge de Madeleine et Ken (impossible de me souvenir précisément dans le bouquin, vraiment). Je les ai toujours imaginés plutôt jeunes, aux alentours des 12 ans, comme inscrits au-dessus. Toutefois, on pourrait parfois penser qu'ils ont tout deux plus ou moins d'expérience. Les réactions, notamment de Madeleine, face à certaines épreuves, peuvent passer pour puériles. Contrairement à elle, Ken, qui lui tient lors de leurs premières rencontres des paroles et des gestes rassurants, passe à mes yeux pour le plus mature des deux. C'est lui qui les sortira d'ailleurs plusieurs fois du pétrin. Malgré tout, les rôles s'inversent parfois, comme cela s'est déjà vu dans plusieurs grands romans de dystopie. Madeleine, dans un sursaut, peut tout autant trouver une solution à un problème en apparence impossible. C'est aussi ce que j'ai beaucoup aimé dans ce livre : les différents obstacles ne sont pas de petits obstacles dépassés en quelques lignes par les deux protagonistes. Karin Serres a réussi à rendre le tout vraiment crédible, si bien que je me suis dis plusieurs fois qu'ils étaient foutus. Et puis non. Rebondissements vous dites ?
J'en profite ici pour vous écrire quelques lignes concernant la fin de cette histoire, sans vous la spoilier, évidemment. Pour moi, cette chute, ce dernier chapitre (vous pouvez inclure le crescendo final aussi) reprend tout ce que j'aime lire : de l'action, beaucoup de suspens et de rebondissements (je ne compte plus le nombre de fois que j'ai employé ce mot dans cette chronique) mais aussi beaucoup d'émotions. Il faut bien le dire, même je me répète à nouveau : je ne m'attendais pas, mais alors pas du tout à cette fin ! Ce scénario ne m'étais même pas venu à l'esprit, pour tout avouer. Toutefois, je ne considère pas cela comme un défaut, bien au contraire. Des dernières pages qui marquent au fer rouge comme celles-ci, ça laisse forcément une trace, un souvenir. Ainsi, on s'en souvient comme d'un roman novateur et marquant. Pas trop mal, comme compliment. 


"L'espèce de pelage qui la couvrait était constitué de centaines de feuilles de toutes les couleurs de l'automne qui frémissaient en rythme. On dirait un tas de feuilles géant. Et vivant.


Tout cela est évidemment favorisé par la plume de Karin Serres, qui s'est donc inspirée de légendes japonaises pour écrire cette histoire. Cela se ressent quelque peu, pas uniquement avec les fameux Happa No Ko, mais aussi dans les descriptions, qui sont tantôt très légères et poétiques. On s'y plait, car le lecteur se rend vite compte que le monde comme il est dans cet univers est bien triste et redondant, presque faux. Une situation d'inconfort s'installe alors, mais celle-ci s'estompe lorsque la romancière développe un peu plus son univers du présent et du passé. J'ai beaucoup aimé en somme, et savoir que Karin Serres vient tout droit du genre théâtrale démontre que certain(e)s auteur(e)s sont capables de passer aisément d'un genre à un autre. Je suis curieux de savoir ce que madame Serres produit au théâtre, mais cela me permettra aussi de savoir ce qui se fait à notre époque dans ce genre littéraire noble et important.




Une bonne surprise, pour me seconde lecture chez Epik'. On a le droit ici à un univers riche, envoûtant mais aussi quelque peu déroutant et gênant parfois. Une intrigue remplie par l'action et les surprises s'y trouve merveilleusement bien développée. L'écriture aux inspirations du pays du soleil levant complète le tout. J'adhère complètement !


lundi 3 décembre 2018

L'atelier d'écriture n°319 de Leiloona : Carpe Diem




Petit baraquement coincé entre le ciel et les montagnes, la piaule de Josh avait ce petit truc en plus. Rustique et moderne à la fois, on avait tout pour s'y sentir à l'aise, comme dans un petit cocon douillé qu'on aurait peine à quitter pour effectuer des tâches quotidiennes bien pesantes, à la longue. En réalité, dans le petit groupe, on ne vivait que pour se réunir ici, le soir, au creux des étoiles et  sous le regard bienveillant de la Lune. La musique déroulait ses notes dans les chaudes nuits de l'été, un goût d'infini dans les yeux de tous. Personne ne songeait ni au futur, ni au passé. Juste vivre l'instant présent à fond, sans aucun regret. C'était sans doute l'une des plus belles applications du Carpe Diem que l'on eu la chance de voir. 


*****


Malgré le plafond étoilé, il fait plutôt frisquet, ce soir. Josh a d'ailleurs décidé de laisser la lumière allumée, pour pouvoir retirer la bâche qui couvrait le sauna rapidement. Après une ou deux hésitations, il décide d'y plonger une jambe, puis l'autre. Nu, il passe quelques minutes à observer les étoiles, en arrière-plan des montagnes qui lui font face. Son regard se déporte ensuite sur sa guitare, qu'il croit distinguer à travers les vitres du châlet, pas loin de la cheminée. La nostalgie le prend peu à peu. Il se sent seul. Horriblement seul. Le silence de la nuit lui pèse, il aurait donné n'importe quoi pour qu'un vinyl se mette en route, évaporant ses maux. Seulement, il n'a pas la force de sortir de la cuve chauffée. Ses yeux se ferment alors que quelques larmes perlent sur ses joues. "Moment de faiblesse" pense-t-il, alors qu'il sombre peu à peu dans un demi-coma, entre désires grandissant et réalité douloureuse. Soudain, il entend une porte claquée à l'étage. Surpris, Josh relève la tête, et se redresse, laissant apparaître le haut de ses pecs. A travers la vitre, il aperçoit l'ombre de sa bien-aimée. Celle-ci le regarde, ses yeux verts émeraudes brillants à la lueur de l'ampoule. Instantanément, Josh retrouve le sourire, et cette petite malice qui caractérise son regard brun. Elle disparaît. Quelques instants plus tard, il entend le craquement caractéristique des marches de l'escalier, puis le grincement de la porte d'entrée. Elle apparaît alors, la lampe d'entrée lui offrant une sorte d'aura, dans la nuit. Un hululement retenti au même instant, rendant l'instant plus magique encore. Doucement, elle ôte à son tour ses habits, et rejoint son amant dans le sauna. Le contact de l'eau chaude lui procure quelques frissons, mais la voilà très vite immergée jusqu'au coup. En quelques mouvements, elle se calle face à lui. Un sourire flotte sur le visage de chacun. Elle se met à fredonner un petit air d'une vieille chanson anglaise, ce qui fait éclater de rire Josh. 

- I'm floating around, in ecstasy... 


Ils passeront la nuit ainsi, oubliant leurs problèmes quotidiens, coupés de tout et de tous. Carpe Diem.


Ce texte a été écrit pour l'atelier d'écriture de Leiloona. Je n'ai pas trouvé les crédits de la photo.

samedi 1 décembre 2018

Deux classiques et un contemporain : Les Justes d'Albert Camus, Le Roi se meurt de Ionesco et Aussi loin que possible d'Eric Pessan

Bonjour à tous ! On se retrouve aujourd'hui pour le fameux format que j'avais testé quelques mois auparavant sur le blog  ! En effet, je dois bien avouer que même si je garde un rythme de  lecture assez constant depuis la rentrée, le temps me manque quelque peu pour m'occuper du site. Je me suis donc dis que quelques petits avis pourraient être une bonne idée pour un retour, bien que je vous prépare des posts pendant ces vacances  ! Here we go !


I. Le Roi se meurt d'Eugène Ionesco 







Pour expliquer le succès du Roi se meurt, on a dit que c'est un classique. Il montre l'homme ramené à sa condition fondamentale. Donc à l'angoisse devant la mort. Cet homme qui parle avec les accents du roi Lear est néanmoins notre contemporain. Il est tellement notre contemporain que son histoire - une existence qui a oublié ses limites - reflète exactement la célèbre «crise de la mort» qui secoue l'Europe de l'après-guerre. Le Roi se meurt n'est pourtant pas une pièce triste. D'abord, parce que l'humour n'y est pas absent. Ensuite, et surtout, parce que Ionesco propose les remèdes pour sortir de la crise. C'est également cela, une grande œuvre classique : une leçon de dignité devant le destin.


On commence donc avec une pièce de théâtre assez contemporaine mais déjà considérée comme un classique : je veux bien sûr parler du Roi se Meurt d'Eugène Ionesco, auteur français d'origine roumain datant du XXème siècle. Ce texte était l'une des possibilités de lecture pour la première séquence de français pour moi cette année, avec Les Justes dont je vous parle un peu plus bas. Un titre évocateur, un petit résumé alléchant de la prof', et me voilà parti dans l'univers nuancé de Béranger, Marie, Marguerite, et tous les autres ! 


J'avais un peu peur de cette lecture, pour tout vous dire. De ne pas comprendre le jeux des symboles, les sous-entendus, et ce malgré l'écriture fluide et assez épurée du romancier roumain. Et quelques semaines après l'avoir terminé, c'est une certitude : je n'ai pas saisi tous les messages que contient cette pièce, et je ne les saisirais sans doute tous jamais. Vous savez, Le Roi se Meurt fait partie de ces oeuvres dont le sens peut changer en fonction de la période, de l'âge auquel chacun découvre l'histoire. Tout dépend du contexte, des sentiments qui vous traversent sur le moment. Malgré une certaine frustration, c'est aussi cela qui fait le charme de l'histoire. Celle-ci, pour tout dire, ne bouge pas beaucoup. On sort quelque peu des règles du théâtre plus classique, puisqu'ici, pas d'actes ni de scènes : tout se passe en un même lieu, avec les mêmes personnages, et avec pour toute échelle de temps la durée complète de la pièce. Le tout est basé sur les dialogues, avec une véritable réflexion sur la mort, et sur l'acceptation de cette dernière. En effet, on retrouve donc un roi, très âgé, avec un royaume en ruine qui part en vrille, ses deux reines, l'une représentant la joie de vivre et l'insouciance, l'autre la sagesse et la réflexion. Quelques autres protagonistes sont également présents, comme un médecin, une servante ou encore un garde. Tout ce petit monde réuni pour une chose : la mort du roi, qui doit survenir à la fin de la pièce. Ce dernier a énormément de mal à accepter sa fin prochaine, et cela donne lieu à des prises de tête, des réflexions sur la vie et ses enjeux mais aussi sur la conclusion : la visite de la faucheuse. 



L'histoire va de paire avec les personnages, et j'ai trouvé ces deux points très bon, même l'ennui a parfois pris le pas pendant ma lecture. L’intérêt de cette pièce réside dans la symbolique des objets, dans les subtilités de certaines paroles. Peu d'action, rien ne bouge réellement. Cette dernière est surtout mentale, dans la tête d'un roi puéril et dans le déni, qui va mûrir peu à peu. Le lecteur saisit au fur et à mesure que ce royaume, que ce roi est en fait lui-même. Chacun est le roi de sa vie, celle-ci constituant son royaume qui lui est propre. Ionesco a tenté de démontrer cela, et il arrive d'après moi avec humour et sérieux à la fois, avec puissance et délicatesse, avec tout et rien, car la vie représente tout, mais personne n'emporte quelque chose dans la mort.



Un texte entre étude ciblée de cours et lecture personnel, intéressant et impressionnant, à lire et à relire pour quiconque, car l'interprétation sera forcément différente en fonction du contexte de vie. Un classique contemporain. 



Après cette lecture relativement lourde, j'ai décidé de sortir de mes étagères un roman plus léger, qui traînait là depuis pas mal de temps : Aussi loin que possible d'Eric Pessan. 




II. Aussi loin que possible d'Eric Pessan 







Antoine et Tony n'ont rien prémédité, rien comploté. Ce matin là, ils ont fait la course sur le chemin du collège. Comme ça, pour s'amuser, pour savoir qui des deux courait le plus vite. Mais au bout du parking, ils n'ont pas ralenti, ni rebroussé chemin, ils ont continué à petites foulées, sans se concerter. La cité s'est éloignée et ils ont envoyé balader leurs soucis et leurs sombres pensées. Pour Tony, la hantise de se faire expulser vers l'Ukraine et d'avoir à quitter la France.


Pour Antoine, la peur de prendre une nouvelle dérouillée parce que son père a envie de se passer les nerfs. Depuis ce matin où tout a basculé, ils courent côte-à-côte, en équipe. Ils se sentent capables de courir pendant des jours, tant qu'il leur restera une once de force. Fatigués mais terriblement vivants.


Alors là, on rentre dans complètement dans ma zone de confort : un roman contemporain, qui traitre de sujets assez complexes et actuels tel que l'immigration et les classes sociales, avec une aventure quelque peu hors du commun. J'étais très enthousiaste à l'idée de cette lecture, qui s'est révélée être une lecture sympathique, divertissante et intéressante, sans toutefois frôler le coup de coeur. Les explications ! 



J'ai lu le synopsis de ce bouquin bien avant ma lecture, c'est ce qui m'a vraiment donné envie de le lire. Vous connaissez sans doute mon point de vue sur la question, et ma principale crainte avec les quatrièmes de couverture s'est complètement vérifiée ici : j'ai eu des attentes. Beaucoup d'attentes. On finit parfois par surestimer l'oeuvre en question, quitte à être déçu. Ayant fait cette expérience plusieurs fois dans le passé, je m'étais promis de ne plus les parcourir avant lecture (et non pas avant achat éventuel). Le roman d'Eric Pessan n'échappe pas à cette règle.
J'avais sans doute placé la barre trop haut pour ce bouquin, qui reste tout de même une très bonne lecture ! 


Niveau personnage, je me suis beaucoup attaché et identifié au narrateur de cette course un peu folle, à savoir Antoine. Forcément moins à Tony, puisqu'on ne le voit que part le regard de son ami, mais il n'en reste pas moins intéressant. Mais son compère reste mon élément préféré de l'histoire, mon petit coup de coeur personnel. Au début jugé trop jeune, j'ai adoré les petites réflexions qu'il égraine tout au long de la course. Eric Pessan, à travers lui, retranscrit merveilleusement bien la sensation de l'effort physique, avec un lexique et une description assez précise concernant la course et la fatigue qu'elle engendre. On avait souvent l'impression d'être enthousiaste en même temps qu'eux, fatigué en même temps qu'eux, avec ces petites fourmis dans les jambes et le coeur qui palpite. Un effort physique en restant dans son lit. Tout bénef', en somme.



Plus généralement, vous savez que j'adore ce genre d'actions dans un roman, qui sort du quotidien et des sentiers battus. Malheureusement, j'ai vraiment éprouvé quelques difficultés à ressentir cette petite chose, ce petit truc en plus qui gigote dans le ventre, qui fait frissonner le bout des doigts lorsqu'on touche le roman pour reprendre sa lecture, que les lecteurs aguerris connaissent sans doute bien. Ce petit machin-là, eh bien... Je ne l'ai pas vraiment eu. Même si j'ai bien réussi à me plonger à fond dans l'histoire, quitte à la finir en vraiment quelques jours, il me manque quelque chose, que j'ai vraiment du mal à vous décrire, vous l'aurez remarqué. Bien que j'accorde beaucoup de crédits à cette véritable quête, je l'ai trouvée… Aie aie aie, c'est très contrasté comme ressenti. J'ai un peu le sentiment d'avoir été un spectateur, mais pas un spectateur plus touché plus que la norme, comme avec les coups de coeur, bien que l'aventure touche à pleins de sujets sensibles, comme je l'évoquais au-dessus. 




Ce petit livre est resté un très bon divertissement pour ma part, mais qui ne taquine pas les sommets non plus. Peut-être que le public visé est un poil plus jeune, et qu'il les fera bien plus réfléchir que moi. Je vous le recommande tout de même, il vaut le détour pour ses personnages et sa course affolante. Une bonne lecture sans prise de tête avec une petite base de réflexion, voilà comment je définirais cette oeuvre d'Eric Pessan.


Bon, bon, bon... On va s'attaquer au gros morceau de cette chronique, l'oeuvre qui m'a le plus marqué, je pense. Encore une lecture de cours, dévorée en quelques jours : Les Justes d'Albert Camus. 





III. Les Justes d'Albert Camus







«Ne pleurez pas. Non, non, ne pleurez pas! Vous voyez bien que c'est le jour de la justification. Quelque chose s'élève à cette heure qui est notre témoignage à nous autres révoltés : Yanek n'est plus un meurtrier. Un bruit terrible! Il a suffi d'un bruit terrible et le voilà retourné à la joie de l'enfance.»


A peine une petite citation pour résumé, et le ton est donné. Cette pièce de théâtre, publiée dans les années 40 par Albert Camus, a été une véritable claque pour moi. Pour commencer, Camus est un auteur que je vais énormément étudié cette année, avec pas moins de trois oeuvres, dont une oeuvre intégrale analysée complètement en classe, à savoir La Peste, et deux lectures dites "cursives", à savoir L'Etranger et Les Justes. Il y a donc tout intérêt à ce que je m'entende à merveille avec ce grand monsieur de la littérature française du XXème siècle, de manière à ce que mon année de français ne devienne pas très vite une calamité. Et notre relation commence merveilleusement bien avec cette courte mais non moins intense pièce de théâtre qui regorge de scènes très intéressantes et de réflexions philosophiques très profondes. Voyons cela ! 


1905. Février. Moscou. Un groupe terroriste révolutionnaire qui se prépare à commettre un attentat envers le Grand Duc, figure du pouvoir en place. Le lecteur, au coeur du groupe, suit la préparation de cette acte criminel, censé "tuer une idée". La pièce est donc vraiment rempli de suspens, et ça ne décroit pas tout du long, avec plusieurs rebondissements et révélations. Par conséquent, je ne me suis vraiment pas du tout ennuyé. L'oeuvre s'étend sur plusieurs jours, avec pour chacun son enjeux et son lot de nervosité, aussi bien pour nous que pour eux. Bien évidemment, il y a des moments plus calmes, avec des discussions un peu plus "posées" entre les protagonistes. Mais, comme je le spécifiais ci-dessus, celles-ci ont un sens toujours profond, avec une base de réflexion très importante, notamment sur des thématiques comme l'engagement, le fait de commettre un meurtre pour une idée ou encore plus généralement la révolution au sens général. En soit, on a là beaucoup de matières et de ressources sur lesquelles s'appuyer en cours de français, avec des débats et des dissertations à la clé. Comme je le disais, cette lecture étant cursive, rien de tout cela, à peine un questionnaire, et je trouve que c'est plutôt positif, car cela m'a permis de garder une libre interprétation de ma lecture, sans être trop cadrer et guider par tel ou tel axe d'étude.



Niveau personnage, on retrouve un groupe assez hétérogène, avec un chef, un psycho-rigide, un poète, une femme déterminée entre autres. Tous, comme vous l'aurez remarqué, représentent une face bien particulière de la révolution à l'époque. Chacun ses raisons pour la mener, et chacun cherche quelque chose de différent pour tout gain de victoire, ce qui rend la lecture diversifiée et d'autant plus intéressante, puisque, vous vous doutez, les points de vues divergents vont souvent se retrouvez à l'affrontement. C'est là que réside tout l’intérêts des Justes, qui pose d'ailleurs une vraie question, rien que part son titre : qui est juste ? Les puissants qui terrorisent et dominent le peuple ou les révolutionnaires qui commettent des actes criminels pour les combattre ? Le débat est habilement ouvert par monsieur Camus, qui offre aussi une bonne partie des arguments... 




Une pièce remarquable, d'une juste profondeur, aussi bien dans la réflexion que dans l'action, une grande prouesse de la part de Camus, que j'aime déjà énormément ! 


Voilà, c'est tout pour aujourd'hui, n'hésitez pas à me dire ce que vous avez pensé de ce format et de mes avis. Enjoy !