lundi 12 mars 2018

L'atelier d'écriture n°297 de Leiloona : une larme au coin de l'oeil...



Je ne me suis pas retourné, ce jour-là, pour apparaître sur cette photo. Happé par la puissance tranquille de cette fontaine, je n'ai pas daigné répondre aux appels de ma douce. Elle m'a montré la photo, quelques secondes plus tard, un demi-sourire planté sur le visage. J'étais retourné, le sac à dos au premier plan. J'ai étiré mes lèvres à mon tour, d'une manière un peu superficiel, une larme au coin de l'oeil qu'elle n'a pas vu, avant de lui planter un doux baiser sur la joue. Même si aucun de nous deux ne l'a pas forcément saisit ce jour-là, quelque chose s'est brisé. Un lien, un fil conducteur qui reliait nos deux coeurs jusqu'alors. Nous ne nous sommes pas adressé la parole durant la soirée. Un doigt entrelacé l'un sur l'autre,  on marchait d'un pas lent, dans le centre de la ville agitée. Le silence est ma muse, je me sentais ivre et nostalgique. On a déambulé pendant plusieurs dizaines de minutes, avec pour toute bande son le rythme de nos respirations. Soudain, quelqu'un l'a arrêtée. Un petit homme, assez maigrichon, les cheveux teints de blanc. Tous deux ont commencé à discuter de manière vive, entre rire et exclamation. Son visage m'était familier, mais aucun nom ne m'est venu. Je suis resté en retrait, après tout, ce n’était pas à moi d'être sur le devant de la scène. Je me suis contenté de les observer à la dérobée, tantôt l'esprit ailleurs, tantôt les yeux braqués sur le guide de la ville. J'avais repéré plusieurs coins sympas, où nous pourrions nous poser, elle sur mes genoux, moi assis sur un banc un peu rouillé, à se chuchoter des mots doux jusqu'à l'aube. Nous n'y sommes pas allé. Je suis rentré à l'hôtel, seul. La solitude me serrait contre son corps chaud, et je m'y lovais avec délectation. En réfléchissant, nous étions si proches mais si différents, elle et moi. Elle, se sentait bien en société, avec ses ami(e)s, sous les regards, avec humour et sérieux à la fois. Je n'aspirais qu'au calme et à la tranquillité. C'est quelque chose que je n'aurais imaginé ressentir quelques mois en arrière. Cette amour qui fût pendant tout ce temps ma nourriture et mon oxygène, ne représentait à présent qu'un poids, une route sans véritable issue. Et j'étais certain que la réciproque était juste. Ils nous consumaient plus qu'ils ne nous rendaient heureux. On en a longuement parlé, à son retour, toute la nuit, jusqu'à épuisement.

Je suis parti à l'aube du lendemain, seul, sans regret, avec un pâle sourire sur le visage et une larme au coin de l'oeil.



Ce texte a été écrit pour l'atelier d'écriture de Leiloona. Je n'ai pas trouvé celui ou celle qui a pris la photo. 

15 commentaires:

  1. une histoire triste -- un amour sans lendemain mais pourquoi ??
    la suite au prochain épisode---
    bonne semaine Victor- bisous-

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    1. Peut-être, je retiens l'idée d'une suite
      bisous Lady !

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  2. ah oui c'est en vivant ensemble qu'on réalise si on est vraiment fait l'un pour l'autre... son côté sociable, son énergie à elle l'avaient peut être attiré au début, comme pour le sortir de la tranquillité de sa vie mais en fait il n'aspire qu'à être tranquille. Sage décision de partir, il en trouvera une plus calme et elle saura aussi trouver chaussure à son pied, je ne me fais aucun souci ;-) un très beau texte Victor, une écriture qui change, j'aime beaucoup. Nady

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    1. Je l'espère de tout cœur en tout cas, peut-être aurons-nous des nouvelles de ces deux-là plus tard...
      Merci pour ton retour Nady !

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  3. mais oui, cette photo m'inspirait une histoire d'amour qui se finit... Joli texte.

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    1. Je crois qu'elle a inspiré cette même trame à beaucoup d'entre nous !

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  4. Très beau texte Victor, avec une belle intensité dans la plume! Bravo!

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  5. Bonsoir,
    Une photo qui inspire un texte de rupture et pourtant on pourrait s'y tromper, mais ne faut-il pas arrêter avantqu'il ne soit trop tard.
    Bonne soirée
    @ plus

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    1. C'est toujours un gros dilemme que la rupture...
      @ plus

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  6. On dit que les différences s'attirent mais quand il y en a trop, il a dęséquilibre, étincelles et souvent rupture... Il a bien fait de partir chercher une autre nourriture, un autre oxygène ailleurs.

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    1. J'espère qu'il trouvera l'oxygène qui lui conviendra le mieux dans ce cas :-)

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  7. Juste un petit fil conducteur ... qui lâche, et sépare les deux moitiés à un instant précis de leur vie amoureuse, une sorte de lassitude qui vient sans crier : Gare ! Sinon on essaierait de faire autrement, non ?

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    1. C'est un sentiment qui arrive souvent sans prévenir... Gare !

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  8. Il se dégage de ton texte une délicate mélancolie

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